TAUBE – Reales Tier / Denktradition

Taube – A. Das reale Tier

Avec environ 350 espèces, les colombidés comptent parmi les oiseaux les plus répandus au monde. Ils ont colonisé toute la planète et occupent de nombreuses niches écologiques. Leur morphologie générale varie peu d’une espèce à l’autre mais ils  présentent en revanche une grande variété de taille, de poids et de plumages. Cette variété s’est accrue de nos jours, grâce au développement de la colombophilie, mais elle avait déjà marqué les auteurs anciens. Selon les espèces, les colombidés peuvent êtres sédentaires ou migrateurs. Leur régime est essentiellement constitué de graines, même si, selon les espèces et leur lieu de vie, ils peuvent l’agrémenter de petits invertébrés (vers, insectes, mollusques) et de fruits ou de végétaux divers.

Les colombidés se caractérisent par rapport aux autres espèces d’oiseaux par deux pratiques: la sécrétion du lait de jabot pour nourrir leurs petits, et le fait qu’ils aspirent l’eau pour boire au lieu de relever la tête pour faire couler le liquide dans leur gosier. La saison des amours a lieu généralement au début du printemps et la couvaison suit immédiatement. Leur mode de nidification est généralement assez fruste: quelques brindilles assemblées sans apprêt ou presque, en général assez haut, proche du tronc d’un arbre au feuillage dense. Ils pondent rarement plus de deux œufs qu’ils couvent environs 3 semaines, puis ils nourrissent les pigeonneaux pendant un peu plus d’un mois, jusqu’à ce qu’ils soient aptes à voler de leurs propres ailes. Il arrive parfois que les parents nichent une seconde fois entre juin et août.

La colombophilie existe depuis la plus haute antiquité, Platon lui-même l’évoque dans son le Théétète (36, 197b) : »Vois donc si l’on peut de même posséder la science sans l’avoir, comme un homme qui aurait pris des oiseaux sauvages, ramiers ou autres, et les nourrirait chez lui dans un colombier qu’il aurait fait construire«. Elle perdure jusqu’à nos jours et certains monuments conservent encore leur ancien colombier comme la forteresse de Chinon (XIIIe s.). On les consommait aussi à partir du moment où les pigeonneaux sont capables de se nourrir. Ils sont le plus souvent bouillis si l’on en croit le Ménagier de Paris, parfois préalablement rôtis, et toujours bien épicés de saveurs douces (cannelle, oranges, gingembre). Le Tacuinum Sanitatis nous apprend qu’étant de complexion chaude et sèche, ils étaient recommandés contre les engourdissements dus au froid, mais pouvaient provoquer des insomnies.

L’’usage des pigeons comme messagers, fut observé par les Croisés en Orient depuis la fin du XIe siècle et noté dans les chroniques: Jean de Joinville, Chronique, 35, 163: »Li Sarrazin envoierent au soudanc par coulons messagiers par trois foiz, que li roys estoit arivez, que onques messaige n’en orent, pour ce que li soudans estoit en sa maladie ; et quand ils virent ce, il cuidierent que li soudans fust mors, et lessierent Damiete«. Cette pratique semble cependant avoir été plus tardive en Occident.

Lit.: A. Zucker: Physiologos, 2004; C. Opsomer: L’art de vivre en santé. Images et recette du moyen âge, 1991; A. Reinfray: Le pigeon voyageur, de l’Antiquité à la colombophilie moderne, 2007; Jean de Joinville: Vie de saint Louis, éd. et trad. par J. Monfrin, Paris, 2002.

Rémy Cordonnier

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Taube – B.1 Antike Zoologie

Aristote évoque souvent les colombidés dans son Histoire des animaux. La première mention des pigeons y apparaît dans le chapitre sur les organes internes des oiseaux (Hist. An. 2, 17), où il évoque la présence du jabot. Plus loin (Hist. An. 5, 13), il donne la liste des principales espèces de colombidés connues et les décrit brièvement. Ainsi apprend-on que le pigeon commun, le pigeon de roche, le ramier, le roussard et la tourterelle sont de taille et de couleur variables, que certains sont plus aptes que les autres à être domestiqués. Dans les régions chaudes et ensoleillées, les colombidés couvent en toutes saisons, et seulement en été dans les régions plus froides, mais ce sont les couvées des périodes tempérées qui sont les plus robustes. Il précise aussi que les tourterelles se déplument en hiver et nichent alors dans des troncs creux.

Aristote s’intéresse de près à la reproduction et à la ponte, en observant avec finesse le développement des œufs et l’éclosion. Il évoque plus brièvement leur mode de nourrissage (Hist. An. 8, 3), indiquant qu’ils sont essentiellement granivores, et poursuit avec des informations sur les espèces migratrices, notamment les ramiers et les pigeons de roche (Hist. An. 8, 12), et sur leurs lieux d’habitation (Hist. An. 8, 15) en précisant que les tourterelles rejoignent les pays chauds pendant les périodes hivernales. De leurs inimitiés (Hist. An. 9, 1), il ne mentionne que celles de la tourterelle avec un oiseau jaune et un oiseau rouge feu non identifiés.

Le Stagirite consacre en revanche un chapitre entier (Hist. An. 9, 7) aux manifestations de leur intelligence, en particulier les comportements pouvant êtres interprétés comme anthropomorphiques. Il insiste surtout sur les marques de tendresse que se portent ces oiseaux. C’est le premier à évoquer leur fidélité, à quelques rares exceptions, les couples ne se briseraient que par la mort de l’un des partenaires. Il souligne également le comportement ambivalent du mâle envers la femelle lors de la reproduction, tantôt attentionné, tantôt emporté, ainsi que leur âpreté à défendre leurs couvées. S’il interprète erronément la régurgitation du lait de jabot, qu’il identifie comme de la terre salée que le mâle aurait préalablement avalée et mâchée, c’est néanmoins le premier à l’avoir signalé. Il en est de même du fait de boire sans relever la tête. Aristote termine ce chapitre par quelques considérations sur leur longévité, précisant que les grands ramiers peuvent vivre entre 25 et 30 ou même 40 ans, alors que les autres espèces vivent généralement une huitaine d’années. Ses dernières remarques portent sur les bains de poussières que pratiquent les colombidés pour se débarrasser de leurs parasites, et des flatulences des tourterelles (9, 51).

Aristote montre beaucoup d’acribie dans sa description, plus que pour la majorité des autres espèces d’oiseaux qui font l’objet de remarques spécifiques dans son livre. La récurrence de ces mentions est certainement due au caractère commun des colombidés et à la plus grande facilité qu’il a eue à les étudier - c’est d’ailleurs aussi le cas pour les gallinacés. Certains passages descriptifs permettent de supposer qu’il a dû pratiquer la vivisection sur certains spécimens. Les colombidés et les gallinacés apparaissent ainsi chez Aristote comme l’exemple type de la gent aviaire. Les informations qu’il donne seront ensuite régulièrement reprises par les autres auteurs antiques qui écrivirent sur le sujet, avec plus ou moins de précisions. Rares seront ceux qui apporteront des informations supplémentaires valables sur ce sujet.

La plupart des données transmises par Pline dans son Hist. Nat. (10, 104-105), étaient déjà présentes chez Aristote. Mais il a lu d’autres sources qui viennent ajouter quelques éléments au dossier, tel que la propension des colombidés au narcissisme. Ce défaut causerait souvent leur perte car, détournant leur attention, il les met à la merci des éperviers. Ce motif sera souvent repris par les auteurs médiévaux. Il développe aussi plusieurs exemples de l’usage qu’on a pu faire des pigeons voyageurs pour transmettre des messages (Hist. Nat., 10, 101) et décrit brièvement les pratiques de colombophilie qui était déjà ancienne à l’époque. On construisait des colombiers et pouvait payer fort cher les spécimens les plus prestigieux. Quant à Solin (Collectanea, 3, 2), il ajoute que les colombidés viendraient de l’ile Colombaria qui leur a donné leur nom.

Ausg.: Aristote: Histoire des animaux, éd. P. Louis, 1964-1969 (l’édition est en plusieurs volumes au sein desquels le propos sur la colombe est dipsersé); Élien: La personnalité des animaux, trad. A. Zucker, 2001-2002; Platon: Théétète, éd. E. Chambry, 1967; Pline l’Ancien: Histoire naturelle, vol. 10, ed. E. de Saint Denis, 1961; Solin: Collectanea rerum memorabilium, éd. T. Mommsen, 1895 (réimpression: 1958).

Rémy Cordonnier

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Taube – B.2 Bibel und Bibelexegese

La colombe est un oiseau aux significations multiples et qui apparaît très souvent dans la littérature exégétique, au point qu’il n’est probablement pas un seul auteur chrétien qui n’ait évoqué cet oiseau dans son œuvre. Il serait trop long d’en repérer toutes les mentions mais les significations allégoriques de la colombe sont finalement assez peu nombreuses.

Dans la Vulgate, la colombe ou la tourterelle (il n’y a qu’un terme hébreu, yonah, pour l’ensemble des colombidés, c’est le grec qui a introduit des interprétations différentes par la suite) sont mentionnées 58 fois, dont 18 fois dans le Lévitique, essentiellement dans des passages relatifs aux rites et interdits relatifs à ces oiseaux, et 7 fois dans le Cantique des cantiques, comme métaphore poétique de l’Épouse ou de ses qualités.

Mais les versets bibliques les plus souvent cités à propos de l’exégèse de la colombe, sont le verset 14 du psaume 67: »Si vous dormez au milieu de vos héritages, vous serez comme des plumes argentées d’une colombe dont le bas du dos est couleur d’or pâle« et le verset 7 du psaume 54: »qui me donnera des ailes comme la colombe, et je m’envolerai et je me poserai?«; l’épisode du baptême dans les Évangiles, que nous avons déjà évoqué plus haut, et la parole attribuée au Christ dans l’évangile selon Matthieu: »Voici, je vous envoie comme des brebis au milieu des loups ; soyez donc prudents comme les serpents, et simples comme les colombes« (Mt 10, 16).

Dans l’exégèse, la colombe est souvent en premier lieu interprétée comme une allégorie de l’Église, notamment chez saint Augustin : »car la colombe n’a pas instruit Jean, sans vouloir instruire aussi l’Église, cette Église à laquelle il a été dit: une est ma colombe« (Homélies sur l’Évangile de Jean, 6, 10) et dans son traité sur le baptême (4, 3, 5): »cette Eglise qui a été appelée la colombe unique«. Saint Jérôme reprend ce thème dans sa lettre à Principia (lettre 65, 15): »L’Église Catholique, cette colombe unique, parfaite et très aimée«.

La colombe est aussi associée au baptême et à la conversion en général. L’entrée dans la communauté des chrétiens est placée sous le signe de la colombe en référence à la descente de l’Esprit Saint sous cette forme lors du baptême du Christ (Mt 3, 16; Mc 1, 10; Lc 3, 22; Io 1, 32). C’est ainsi qu’Origène d’Alexandrie explique dans son Commentaire sur le Cantique des cantiques (4, 1, 5): »ceux qui accueillent la puissance du Saint Esprit, qui sont sanctifiés par lui et remplis de ses dons, du fait que lui-même est apparu sous l’aspect d’une colombe, deviennent eux aussi des colombes, en sorte qu’ils s’envolent des lieux terrestres et corporels vers les réalités célestes, soulevés par les ailes du Saint Esprit«. C’est aussi en raison de la manifestation de l’Esprit Saint sous la forme d’une colombe lors du Baptême du Christ que les homélies 5 et 6 d’Augustin sur l’Évangile de Jean, ainsi qu’un long passage de son traité sur le baptême (De bapt., 3, 17, 22), sont intégralement consacrés à l’interprétation des valeurs allégoriques de cet oiseau.

Par extension, la colombe devient parfois la figure de la condition religieuse en général, ce qui explique son association antinomique avec le rapace, figure du monde laïc. Les Pères de l’Église surtout ont beaucoup utilisé l’opposition naturelle entre l’oiseau rapace et la colombe. Le rapace peut être connoté positivement ou négativement selon le contexte, mais il est toujours là en tant que symbole de la laïcité ou de la vie mondaine. Ainsi Aponius, dans son Commentaire sur le Cantique des cantiques (1, 10) explique: »Elle est appelée ›colombe‹ [l’Épouse du Cantique]: ayant renoncé à tous les actes de rapacité qu’elle avait coutume de commettre de ses mains crochues comme des serres de vautour (velut vulturis ungulis)«, ou encore, (6, 1): »Ainsi, ces yeux, qui avaient coutume, comme ceux de l’épervier, de guetter leur proie, de convoiter le bien d’autrui ou les spectacles lascifs, maintenant qu’ils ont connu le Christ, remplis de la simplicité de ceux des colombes, brillent de la lumière de la miséricorde, de la douceur et de la chasteté«. Dans certains textes monastiques, comme les Apophtegmes des Pères, la vocation religieuse elle-même est figurée par une colombe. Chez de nombreux autres auteurs, la colombe devient une figure du religieux ou de l’âme qui aspire à l’élévation spirituelle.

Une autre opposition également régulièrement développée au Moyen Âge (cf. notamment Pierre de Riga, Aurora, De diluvio, 69ff), est celle de la colombe et du corbeau. Elle se fonde bien entendu sur le passage de la Genèse (8, 6-12) qui relate l’envoi successif des deux oiseaux à la recherche d’un indice de la fin du déluge. Envoyé en premier, le corbeau ne revient pas, trop occupé à se repaître des cadavres qui surnagent. La colombe en revanche revient deux fois avec finalement le fameux rameau d’olivier avant de reprendre sa liberté la troisième fois. L’opposition des deux oiseaux est motivée à la fois par leur régime alimentaire: le corbeau est un charognard, la colombe un granivore; et par la couleur de leur plumage: noir pour l’un et traditionnellement blanc dans ce contexte pour la colombe. Dès lors, les deux oiseaux ont généralement été interprétés, pour le corbeau, comme une figure de l’homme charnel qui se laisse tenté par les plaisirs mondains, et, pour la colombe, comme une image des religieux qui se nourrissent du bon grain des Écritures et préservent leur pureté en résistant aux tentations du monde.

Enfin, les pigeons et le colombier sont parmi les métaphores les plus couramment employées dans les textes antiques et médiévaux, pour illustrer les pensées ou les souvenirs. Cette comparaison trouve sa source dans le Théétète de Platon (36-37), où le colombier est le locus memoriae dont les oiseaux illustrent les sciences que l’on a apprises et que l’on cherche à se remémorer. Après Platon, la métaphore aviaire employée pour illustrer le fonctionnement de la pensée ou l’organisation de ses principaux outils que sont les livres connaît une certaine fortune. Ainsi Columelle emploie le terme cella pour désigner les lieux où l’on élevait les pigeons, et le terme loculamenta pour désigner les boulins alors que c’est un terme normalement utilisé pour désigner les casiers d’une bibliothèque.

Lit.: M. Carruthers: Le livre de la mémoire, 2002, 61 W. B. Clark: The medieval Book of Birds, 1992; J. Daniélou: La colombe et la Ténèbre, 1992; H. Peters: Miles christianus oder Falke und Taube, dans: Festschrift für Otto von Simson zum 65. Geburtstag, 1977, 53-61; B. Van den Abeele: Le faucon sur la main, dans: La chasse au Moyen Âge, 2000, 87-109; J. Voisenet: Bêtes et hommes dans le monde médiéval, 2000. R. Favreau: Sine felle columba, Cahiers de Civilisation Médiévale 32 (1989), 10, 5-113; A. Feuillet: Le symbolisme de la colombe dans les récits évangéliques du baptême, Recherches de Science Religieuse 46 (1958), 524-44; P. E. Beichner: Aurora: Petri Rigae Biblia Versificata, 1965. D. Lau: Columba, dans: Augustinus Lexikon, bd 1., 1986-1994.

Rémy Cordonnier

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