Ameise – D.2 – III.1 Fabel

En Italie, le succès de la fable au Moyen Age, phénomène durable et homogène du point de vue géographique, a son fondement dans la valeur exemplaire des textes issus de la tradition ésopique. Très diffusées dans le milieu de l’enseignement dès le XIIIe siècle, les versions en langue vulgaire des Ysopets remontent notamment à deux sources, le recueil de Marie de France et le Romulus de »Gualterus Anglicus«. C’est dans le contexte de cette production que la fourmi trouve sa place.

Les cinq manuscrits italiens contenant la traduction des fables de Marie de France comprennent une version de La Cighala che chiedeva mangiare a le Formiche. Les réprimandes de la fourmi soulignent à la fois la vanité du chant et les risques que comporte la fainéantise. En particulier, dans le texte transcrit dans le ms. Ashburnam 649 (CIFARELLI, 20) les fourmis (toujours au pluriel dans cette version) reprochent à la cigale d’avoir chanté pour son propre plaisir; de plus, puisqu’elle ne peut se rendre utile en aucune manière, elle n’aura rien.

Les fabliers italiens dérivés des fables en distiques élégiaques de Gualterus Anglicus (»Walter l’Anglais« ou Anonymus Neveleti) qui figuraient également parmi les auctores lus à l’école reprennent ce thème: dans le manuscrit Rigoli (GHIVIZZANI, 21), on rappelle, en quelques vers essentiels, la nécessité d’être prévoyant à l’image du petit insecte pour éviter une vieillesse malheureuse; dans la fable 95 du manuscrit Riccardiano 1764 (ibid.) on insiste sur le fait qu’il faut travailler lorsqu’il est temps et on se souvient du mot de Salomon »che l’uomo pigro si dee imprendere dalla Formica«.

Dans les textes appartenant à cette même série la modestie de la fourmi, devenue proverbiale dès sa confrontation avec la vantardise de la → mouche, eut un écho également important: »la Formica è assomigliata all’uomo, che non offende altrui, ma, quando è offeso, sa rispondere« (GHIVIZZANI, 37). Tout à fait en ligne avec la tradition, mais avec une verve surprenante de la langue, dans l’Esopo Toscano (BRANCA 1989, 38) et dans l’Esopo Veneto (BRANCA 1992, 39), la fourmi répond à l’insolence de la → mouche et reprend les arguments de celle-ci pour les développer en sa propre faveur: elle mange pour vivre alors que la mouche vit pour manger, elle sait jouir du peu qu’il lui faut et elle vit en paix sans déranger personne. Accio Zucco dans son Esopo de la fin du XVe siècle (BRUSH, 37) montre l’exemple de la fourmi pour insister davantage sur la morale: »prima vertute è costringere la lingua«. A la même époque, le Napolitain Francesco del Tuppo insiste sur l’habileté rhétorique de la fourmi: dans la tropologie qui suit sa version de l’apologue ésopique (DE FREDE, 39) il en loue la réponse »cussì logicale e piena de polite argumenti«.

Ausg.: Esopo zuccarino, éd. M. P. BRUSH, dans: Studies in Honor of A. Marschall Elliott, t. 1, 1911, 375-450, voir 418; Francesco Del Tuppo: Aesopus. Vita et fabulae latine et italice, éd. C. DE FREDE, 1968; Esopo toscano dei frati e dei mercanti trecenteschi, éd. V. BRANCA, 1989; Esopo veneto, éd. V. BRANCA, 1992.

Lit.: P. CIFARELLI: Una traduzione italiana delle »Fables« di Marie de France. La parola del testo 2 (2005), 432; P. CIFARELLI: La fortune de Marie de France en Italie aux XIVe et XVe siècles. Reinardus 19 (2006), 53-73; G. GHIVIZZANI: Il volgarizzamento delle favole di Galfredo dette di Esopo, 1968.

Laura Ghiosso

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